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Coronavirus : la réforme de la taxe d’habitation menacée ?
Publié le 11 Avr 2020
Lecture de 4 min.
Thématique : Actualités
Rédigé par Antoine Sage
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Alors que le gouvernement a annoncé l’entrée de la France en récession économique, les baisses d’impôt prévues à partir de 2021 ne semblent pas remises en cause. La disparition annoncée de la taxe d’habitation devrait pourtant contribuer à la chute des recettes de l’Etat. Explications.
Covid-19 : des contraintes budgétaires
Alors que nous traversons « la plus grave crise sanitaire qu’ait connu la France depuis un siècle », le gouvernement se bat pour éviter la récession économique qui talonne l’épidémie de Covid-19. Pour faire face à cette situation hors du commun, des mesures exceptionnelles ont été prises et des fonds ont été débloqués afin de soutenir l’économie et de financer le système de santé français. Cette crise économique et sanitaire a un coût et, déjà, certains experts évoquent les mesures fiscales à prendre pour renflouer les caisses de l’Etat après la crise.
Au milieu de cette tempête, le gouvernement tente de faire le grand écart. Il subventionne les entreprises et les salariés pour maintenir à flots l’économie durant la période de confinement tout en affirmant ne pas revenir sur sa politique fiscale. En effet, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire a réitéré, lundi 6 avril, la volonté gouvernementale de ne pas augmenter les impôts à l’avenir. Il a, cependant, évoqué un éventuel nouveau débat sur la politique fiscale lors de l’élaboration du budget 2021.
«Les politiques fiscales que nous avons définies depuis le début du quinquennat sont celles auxquelles nous restons attachés (et) sont maintenues.»
Bruno Le Maire, ministre de l’Économie sur France 2, lundi 6 avril 2020.
L’inévitable changement de priorités
La suppression de la taxe d’habitation semble donc maintenue coûte que coûte. Pour rappel, la réforme de la taxe d’habitation a été modifiée par la loi de Finances 2018. La taxe d’habitation sur la résidence principale a baissé progressivement pour 80 % des Français. Cette année, seul 20% des Français les plus aisés sont soumis à la taxe d’habitation. Pour les ménages restants, la suppression totale est prévue pour 2023.
Ainsi 2020 est, à la fois, l’année de la plus forte récession depuis 1945 et celle où la majorité des Français paie moins d’impôts. Ajouter à cela un déblocage de montants colossaux par l’Etat pour faire face à la crise actuelle. Clairement, les recettes des finances publiques enregistrent une chute conséquente.
60 milliards €
C’est la perte économique par mois de confinement, soit 2,6 points du PIB annuel de la France, selon une évaluation du département Analyse et prévision de l’Observatoire Français des Conjonctures Économiques (OFCE – Sciences po)
La France n’ayant pas encore vécu le pic de l’épidémie, le confinement pourrait bien être prolongé. Autant dire que les pertes à prévoir sur le plan économique sont importantes. Le gouvernement se trouve donc dans une impasse. D’une part, il doit appliquer la réforme votée par la loi de Finances 2020. D’autre part, cette réforme arrive au pire moment puisqu’elle vient amoindrir les recettes de l’Etat.
Le coût économique et politique de la réforme
La réforme de la taxe d’habitation pèserait, relativement, lourd dans le budget. En effet, la suppression de la taxe d’habitation pour les 20 % des ménages les plus aisés coûterait à l’Etat 7 milliards d’euros. Cette somme viendrait s’ajouter aux 10 milliards d’euros consacrés aux 80 % des ménages bénéficiant déjà de la réforme. Un coût non-négligeable en cette période difficile.
À ce coût économique, s’ajoute le coût politique de la réforme. Bien qu’elle soit dictée par le Conseil constitutionnel, l’application de la réforme pourrait être vue d’un mauvais œil alors que les inégalités liées au confinement sont déjà pointées du doigt. Durant cette période, tous les Français ne sont, effectivement, pas logés à la même enseigne sur le plan fiscal et économique. Le contexte actuel est loin d’être propice à l’application de la réforme de la taxe d’habitation. En effet, le débat pourrait être biaisé et sa mise en place faussée par cette situation exceptionnelle.
L’application de la réforme fragilisée par la crise
Le moment semble donc véritablement mal choisi. Au-delà de l’éventuelle mauvaise réception de la nouvelle, l‘application de la réforme risque d’être plus difficile que prévue. En théorie, les textes de la réforme prévoient que les recettes perdues par les communes suite à la suppression de la taxe d’habitation soient compensées par un savant jeu de vases communicants : les communes se verraient affecter la taxe foncière jusqu’alors perçue par les départements. Ces derniers recevraient alors une fraction de la TVA.
Cette mécanique, en temps normal, est bien huilée, sauf que, pendant les périodes de crise comme celle que nous vivons actuellement, les recettes de la TVA deviennent irrégulières. Inaugurer ce mécanisme de compensation cette année n’est pas une bonne nouvelle pour tous, notamment pour les départements. À Bercy, on répond qu’en cas de crise, la loi a prévu un plancher de 15 milliards d’euros de compensation pour faire face aux dépenses des départements. Une bouée de sauvetage qui semble être lancée à la hâte pour ne pas mettre en péril la réforme. Car, dans la tempête, le gouvernement cherche à maintenir le cap : réduire la pression fiscale.
En résumé
- L’épidémie de coronavirus et les mesures de confinement ont plongé la plupart des pays européens, dont la France, dans une récession économique inédite.
- Si Bruno Le Maire a affirmé le maintien de la politique fiscale, malgré la chute vertigineuse des recettes de l’Etat, la réforme de la taxe d’habitation peut être menacée.
- Le coût économique et politique de cette réforme prévue depuis 2018 est important et viendrait plomber les finances publiques déjà mises à mal par la crise liée au coronavirus.
- Enfin, la mise en place de cette réforme, cette année, aurait un impact économique important sur les budgets des départements, dorénavant tributaires de la TVA.
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Antoine Sage
Conseiller en gestion de patrimoine dans la Région du Sud-Est
Après un parcours en droit, fiscalité et gestion de patrimoine, j’ai pu mettre en pratique mes compétences au sein d’étude notariale, banque privée et cabinets de gestion de patrimoine. Mes compétences techniques et pratiques me permettent aujourd’hui la rédaction d’articles liés à la gestion de patrimoine.
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